Citroën décolle

En championnat du monde des rallyes, le talent du pilote n’est pas tout. La réduction du poids de la voiture et des frottements a aussi son rôle à jouer.

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Résumé

Citroën Sport, l’écurie de course automobile de Citroën, participe au championnat du monde des rallyes (WRC) et au championnat junior WRC. En 2004, la marque a remporté le titre des constructeurs avec ses Xsara pilotées par Sébatien Loeb (champion du monde des pilotes) et Carlos Sainz (4e du championnat). Citroën fait partie du groupe PSA Peugeot Citroën, deuxième constructeur automobile européen. Les ventes du groupe se sont élevées à 3,375 millions de voitures particulières et de véhicules utilitaires en 2004, soit 5,6 % du marché mondial.

En championnat du monde des rallyes, le talent du pilote n’est pas tout. La réduction du poids de la voiture et des frottements a aussi son rôle à jouer.

En octobre 2004,Sébastien Loeb, premier pilote de Citroën Sport, est au summum de sa carrière : il termine 2e du Tour de Corse sur sa Xsara et est sacré champion du monde des pilotes de rallye. Son écurie remporte le titre des constructeurs.

Les performances du pilote sont remarquables car il a remporté six des 16 épreuves de la saison, sur la glace à Monte-Carlo, la neige en Suède, l’asphalte en Allemagne et la poussière à Chypre. Quant au Team Citroën, avec deux titres consécutifs, il est devenu une écurie de référence. Mais l’Alsacien, son copilote monégasque Daniel Elena et toute l’équipe ne s’arrêtent pas là : ils veulent une voiture encore meilleure et plus rapide.

Au moment où le constructeur aux chevrons triomphe, il est déjà en pleine discussion avec SARMA, son fournisseur de roulements spéciaux. On n’associe généralement pas les composants automobiles à cette société de SKF Aerospace, qui est plutôt spécialisée dans les équipements, pièces et services pour l’industrie aérospatiale mondiale. Mais comme le précise Arnaud Brilland, ingénieur chargé du développement du châssis chez Citroën Sport, « ils fournissent de nombreux composants pour la voiture et sont un bon partenaire. Nous voulons sans cesse améliorer les performances et ils comprennent ce que nous faisons et ce que nous devons faire pour aller plus vite. C’est un vrai dialogue bilatéral. »

Au cours de leurs réunions, SARMA a proposé à l’équipe d’Arnaud Brilland plusieurs améliorations, notamment un nouveau composant particulièrement innovant.

Nous sommes en janvier 2005, soit dix semaines après que cette idée ait été présentée. Stéphane Gehu, responsable du bureau d’études de la Division roulements de SKF Aerospace, et le concepteur Pascal de Leo se rendent à Paris chez Citroën Sport pour faire tester le nouveau composant.

L’atelier, aussi propre qu’un hôpital, bourdonne d’activité : les techniciens vêtus de la fameuse combinaison rouge effectuent les derniers réglages sur les deux voitures avant le premier rallye de la saison, celui de Monte-Carlo. Chaque épreuve présentant ses propres difficultés, les véhicules sont complètement démontés et remontés entre chaque rallye. « À Monte-Carlo, on roule sur de l’asphalte ordinaire : les pneumatiques et l’adresse du pilote sont des facteurs particulièrement importants », explique Arnaud Brilland.

Dans l’atelier trônent quatre voitures de courses et trois véhicules d’essai en mauvais état. À l’extérieur, les palettes de pièces détachées et l’équipement attendent de partir pour le sud de la France. Comme le savent déjà les passionnés, l’écurie et Sébastien Loeb ont remporté le rallye de Monte-Carlo avec trois minutes d’avance sur le second.

 

À part la réductiondes frottements, la principale gageure pour les équipementiers est de réduire le poids des composants. Le poids minimum des voitures de rallye est de 1 230 kilos. En fait, elles sont souvent plus légères : les techniciens ajoutent du lest ça et là en fonction des conditions de course ; la plupart est placé à l’arrière pour compenser le poids du moteur à l’avant. La Xsara 2005 a perdu plusieurs kilos par rapport à la saison précédente et le nouveau composant SARMA est aussi plus léger que celui qu’il remplacera. « Il est en titane et non en acier inoxydable ou en acier au carbone, indique Arnaud Brilland. Le titane est 40 % plus léger que l’acier. Nous gagnons entre 20 et 60 g par pièce sur un poids total de 70 à 190 g. »

L’intérêt manifesté par PSA Peugeot Citroën pour ce sport très suivi qu’est le rallye est facile à comprendre : la réussite de Citroën Sport a permis d’atteindre un objectif marketing clé en changeant radicalement l’image de la marque. Mais qu’en retire SARMA, qui collabore avec l’écurie depuis plus de quatre ans et qui fournit également la plupart des équipes de formule 1 ?

En deux mots, les transferts de technologie encouragent le progrès. Les roulements montés sur une voiture de rallye sont mis à rude épreuve. L’expérience tirée de ce type d’application permet d’améliorer les applications aérospatiales. « La course automobile ouvre la voie à la technologie aérospatiale de pointe, estime Stéphane Gehu. Près de 95 % de nos activités touchent à l’aérospatiale, mais en étant actif sur d’autres marchés, nous compensons les hauts et les bas d’un marché aérospatial très erratique. »

 

L’industrie du rallye évoluebeaucoup plus vite que l’aérospatiale : les délais d’exécution pour le nouveau composant ne sont que de 10 semaines au lieu des 30 nécessaires dans l’aérospatiale, ce qui permet de mettre de nouvelles techniques au banc d’essai. « Nous sommes très emballés par la nouvelle pièce créée ensemble car c’est un bon exemple de roulement intégré, souligne Arnaud Brilland. Nous ne l’utiliserons pas à Monte-Carlo, mais elle sera bientôt prête pour les essais. »

Dans son bureau l’attend le prototype d’un autre nouveau composant susceptible d’alléger encore la voiture d’un demi-kilo, une réduction notable. « On n’a pas les moyens d’arrêter d’innover en course automobile, sinon vos concurrents vous doublent. C’est pourquoi nous sommes ravis de recevoir ce prototype. »

La conquête de la première marche du podium est une lutte incessante qui est menée avec autant d’intensité dans les ateliers que sur les pistes.


SARMA et SKF Racing

SARMA fournit des roulements rigides à billes et des roulements à rotule sur rouleaux pour la course automobile. La société adapte également des produits de l’aérospatiale pour répondre aux critères des voitures de course : le cadmiage, par exemple, est interdit en sport automobile ; de même, la graisse standard utilisée dans l’aérospatiale ne convenant pas, SARMA fournit une graisse LGHB-2 spécialement adaptée.

SKF Racing a été créé en avril 2001, mais SKF fournit des composants à l’industrie de la course automobile depuis près d’un siècle. C’est cette division, plutôt que les écuries, qui commande directement à SARMA des roulements légers, à faibles frottements et résistants à l’usure. Ses ingénieurs se servent d’un système de simulation informatique pour modéliser les performances des roulements sur différentes voitures et dans des conditions de course variées.