Joan Higginbotham – Astronaute par accident
En décembre 2006, Joan Higginbotham décollait à bord de la navette Discovery pour rejoindre la Station spatiale internationale. Quatre mois après son retour, elle a rendu visite avec ses coéquipiers à SKF et à Göteborg. Evolution l’a rencontrée.
Résumé
ÂGE : 43 ans.
SITUATION FAMILIALE :
ami et chat.
FORMATION : licence d’électrotechnique, maîtrise de gestion, maîtrise spécialisée systèmes spatiaux.
LOISIRS : faire de l’exercice et passer du temps avec ses amis.
En décembre 2006, Joan Higginbotham décollait à bord de la navette Discovery pour rejoindre la Station spatiale internationale. Quatre mois après son retour, elle a rendu visite avec ses coéquipiers à SKF et à Göteborg. Evolution l’a rencontrée.
Le soleil brille,mais le fond de l’air est frais à Göteborg. Joan Higginbotham est en Suède avec l’équipage de la navette spatiale Discovery et, ce matin-là, elle participe à une conférence dans le cadre du festival international de l’espace à l’université technologique de Chalmers, à Göteborg.
Bien que beaucoup des spectateurs soient venus pour rencontrer leur compatriote cosmonaute Christer Fuglesang, c’est l’Américaine qui est la plus remarquée. Petite, presque menue, un sourire contagieux, une apparence soignée et méticuleuse, elle ne correspond vraiment pas au cliché de l’astronaute.
Joan Higginbotham raconte que son rêve d’enfant n’était pas d’aller dans l’espace. Elle avait plutôt pour objectif de devenir ingénieur électricien et de travailler chez IBM. De toute manière, tout cela se passe en 1987 et, à l’époque, IBM ne recrute pas d’ingénieurs. « Dans l’intérim, la National Aeronautics and Space Administration [NASA], qui venait faire passer des entretiens sur notre campus, était en quête d’ingénieurs électriciens et mécaniciens. On leur a donné nos C.V. à notre insu, et, un jour, un responsable m’a appelée et m’a donné le choix entre deux postes au centre spatial Kennedy. »
Elle croit d’abord qu’il s’agit d’une blague. Mais la personne à l’autre bout du fil est sérieuse. « Ils m’ont fait venir. J’ai vu la rampe de lancement qui ressemblait à un truc tiré de La guerre des étoiles. À ce moment-là, j’ai pensé ‘je peux le faire’. »
Voilà comment, en 1987, elle commence sa carrière en Floride en tant qu’ingénieur électricien charge utile au sein de la division des systèmes électriques et de télécommunication. Ensuite, elle travaille à la reconse bild uration de la soute pour toutes les missions de la navette et effectue des essais de compatibilité électrique pour toutes les charges utiles embarquées. Mais elle n’imagine toujours pas devenir cosmonaute. « J’étais très satisfaite. Je continuais d’être promue et je montais dans la hiérarchie. Un jour, mon chef m’a dit que je ferais sûrement un bon astronaute. »
Finalement, elle pose sa candidature qui est retenue. En août 1996, elle commence sa préparation.
Au moment du décollagede la navette Discovery STS-116, le 9 décembre 2006, l’équipage dont elle fait partie s’entraîne depuis plus de dix ans. « Je ne peux vraiment pas décrire ce que j’ai ressenti quand on a décollé. Si seulement je pouvais. C’est l’une chose des choses qu’il faut absolument éprouver par soi-même. C’était incroyable. J’étais dans le poste de pilotage avec mes coéquipiers, et au décollage, nous nous sommes donnés la main et les avons levées en l’air dans la joie et l’euphorie. »
Dans l’espace, sa principale mission est de manœuvrer le bras robotisé de la station spatiale, une tâche très éprouvante pour les nerfs. « À chaque fois, j’avais ce que j’appelle un ‘chargement précieux’ à l’autre bout : la première fois, c’était un segment de poutre que nous devions installer sur la station ; la seconde, c’était un coéquipier. »
Éprouvante ou non pour les nerfs, la mission se déroule bien et le premier voyage dans l’espace de Joan Higginbotham se termine au bout de 12 jours, 20 heures et 45 minutes.
Est-elle prête à recommencer ? « Absolument. Si on me dit demain que j’y retourne dans cinq mois, je réponds ‘D’accord, on y va’. Il y a deux ou trois choses qui rendent ces missions si exceptionnelles. Sur le plan personnel, c’est un vrai accomplissement. Sur un plan plus général, je pense que c’est un moyen d’aider mon pays en contribuant à construire cette station spatiale internationale. Nous collaborons avec 15 pays au total, nous faisons donc notre part en favorisant la coopération internationale. »
Joan Higginbotham est la troisième Afro-Américaine à aller dans l’espace et cela a aussi son importance, insiste-t-elle. « Il y a beaucoup d’enfants noirs qui n’ont aucun modèle. Les seuls exemples qu’ils voient à la télévision sont, soient des souteneurs, soit des revendeurs de drogue. Ils ont besoin d’une référence positive dans leur vie. De ce point de vue, c’est très important. »
Autrement, ajoute-t-elle, elle a du mal à se sentir l’étoffe d’un modèle. Elle dit vivre sa vie sur la base de trois principes et si quelqu’un trouve cette méthode stimulante, ce serait « merveilleux ». « D’abord, j’essaye d’être quelqu’un de bien car, cela, on ne peut pas vous l’enlever. Ensuite, j’essaye d’être une citoyenne modèle et productive. Enfin, et le plus important, j’essaye de ne pas faire honte à mes parents. »
Son père est décédé il y a six ans, mais sa mère est toujours en vie. Elle est extrêmement fière de sa fille même si elle a été un peu inquiète pendant une bonne partie de la mission. « Comme toutes les mères », concède Joan Higginbotham, en soulignant qu’elle est comme tout le monde. Son ami est patron d’une entreprise de construction, son frère chirurgien orthopédiste et sa sœur orthophoniste. « Quand je ne travaille pas, j’aime bien sortir. C’est mon relaxant à moi. Je vois mes amies. On va faire les magasins, on va au restaurant et on se raconte ce qu’il y a de neuf. Des choses normales. On est des gens ordinaires, c’est juste notre métier qui sort de l’ordinaire. »