La téléformation au pouvoir

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Les salles de cours virtuelles et la formation par téléphone portable sont les deux nouvelles téléformations en vogue. Comme toujours, la difficulté consiste à exploiter au mieux la technologie.

Une formatrice salue ses élèves, plaisante un instant et ouvre une présentation Power Point de la leçon du jour. Elle demande combien de participants ont lu le chapitre d’introduction. Presque tous répondent par l’affirmative en cliquant sur leur souris.

Formatrice et élèves ne sont pas physiquement présents dans la même pièce. Peut-être sont-ils même sur des continents différents et ne sont unis que par leur ordinateur et ses outils logiciels.

Depuis son émergence il y a une vingtaine d’années, la téléformation a vite gagné en popularité. Depuis cinq ans, supports et méthodes se multiplient en fonction de l’évolution de la technologie. Les patrons découvrent que ce moyen leur permet de gagner temps et argent tout en diffusant plus vite et plus facilement le savoir.

La dimension internationale et la nature compétitive des affaires obligent aujourd’hui les multinationales à partager les bonnes pratiques entre leurs nombreux sites. Elles tiennent à s’assurer que le niveau de compétences donné par une formation spécifique sera le même, indépendamment de la langue d’enseignement ou du pays où a lieu la formation.

La téléformation permet d’atteindre ce résultat plus facilement que via la formation traditionnelle en classe. Mais la principale difficulté est d’exploiter au mieux la technologie. La téléformation doit favoriser l’apprentissage et non distraire l’attention de l’élève.

La téléformation, soit l’enseignement par l’informatique, est divisée en deux catégories : synchrone (salles de classes virtuelles accueillant, via un réseau, un groupe d’élèves en temps réel) et asynchrone (apprentissage par ordinateur à son propre rythme).

La plupart des activités de téléformation appartiennent à la seconde catégorie. Ces cours sur mesure pour le personnel, les distributeurs ou les clients les aident à s’informer rapidement sur des processus ou des produits spécifiques. Beaucoup d’entreprises y ont recours, par exemple, pour que leurs salariés reçoivent la formation de base obligatoire.

Ces cours virtuels gagnent rapidement des parts de marché. Ils représentent 25 % de toutes les forma­tions officiellement dispensées dans les grandes entreprises et organismes gouvernementaux, affirme Ruth Clark, experte en pédagogie et formation technique, et présidente de Clark Training & Consulting (www.clarktraining.com). « Les entreprises aiment ces salles de cours virtuelles. Elles n’ont pas besoin d’envoyer un salarié quelque part, ce qui suppose qu’il passe moins de temps loin de son lieu de travail et qu’elles économisent des frais de déplacement. »

Polyvalence mise à part, ces salles de cours nouvelle formule pourraient encore s’améliorer en termes de technicité et d’interactivité. Ces améliorations sont en cours, estime Ruth Clark, qui a contribué à faire évoluer ce qu’on appelait la formation informatisée au début des années 1980.

À cette époque, rappelle-t-elle, il s’agissait essentiellement de simulations de programmes d’ordinateurs centraux. « Puis les PC ont évolué et l’on a pu ajouter des supports visuels et audio. Ensuite la capacité des mémoires a augmenté, ce qui a permis de compléter par des animations et simulations. » À ce moment-là, au milieu des années 1990 environ, les cours de téléformation étaient en général stockés sur disques durs, disquettes ou Cd-rom. « Puis Internet est arrivé. Au début, c’était un grand pas en arrière puisque le débit était limité. Nous avons dû délaisser les supports visuels avec son pour revenir à de simples textes sur écran. »

Grâce à la généralisation du haut débit, la téléformation a rattrapé son retard. La prochaine innovation frappe déjà à la porte : le m-learning, la formation par téléphone portable ou assistant personnel. Selon Ruth Clark, la mobilité du support est séduisante, mais tout cela laisse une impression de déjà vu. « La technologie est très récente, mais on peut déjà dire que l’écran est trop petit. À moins qu’elle n’évolue, les supports visuels, l’audio et l’interactivité seront restreints. Retour vers le futur, une fois de plus. »

La vénérable salle de cours n’est pas encore enterrée non plus. Selon le rapport sur l’état de l’industrie 2005 publié par l’American Society for Training and Development (ASTD), 70 % de tous les cours de formation officiels sont dispensés dans des salles de cours par des formateurs présents sur place. La téléformation est utilisée en conjonction avec d’autres méthodes traditionnelles.

Cela n’empêche pas le marché de la formation de croître inexorablement. Le niveau des investissements consentis augmente, ainsi que la perception de la valeur de la formation dans l’amélioration des performances d’une entreprise. « Aujourd’hui, la fonction ‘formation’ d’une organisation a la même importance que les autres, souligne Brenda Sugrue, directrice de recherches à l’ASTD et auteur du rapport 2005. On accorde plus d’attention à l’efficacité opérationnelle, à la responsabilisation et à la liaison avec la stratégie de l’organisation. »

Mais si la téléformation progresse, la mauvaise téléformation progresse elle aussi. « La mise en œuvre de ce type de formation est de plus en plus facile, reprend Ruth Clark. Mais cela signifie aussi que l’on peut proposer facilement des cours bâclés. Nous avons tous assisté à des cours pas très réussis. Si vous voulez valoriser les connaissances et les compétences, demandez-vous : ‘Comment élaborer et développer efficacement une formation qui atteigne son but sur le plan pédagogique ? une formation individuelle, une téléformation synchrone ou asynchrone ? un support secondaire ou un autre type ? ai-je besoin d’une assistance au téléphone ? de documents imprimés ? si je veux donner beaucoup d’informations, pourquoi ne pas créer un site Web ?’ »

Ruth Clark prédit que demain, la téléformation intégrera mieux l’apprentissage et la gestion du savoir. Les développeurs NTIC trouvent chaque jour de nouveaux moyens pour capter et distribuer l’expertise au sein des entreprises. « Avant, la téléformation était un cours, une salle de cours, une manifestation séparée. Nous voyons de plus en plus la téléformation intégrée dans le lieu de travail. Il y a tant d’expertise à transmettre dans une grande organisation : comment pouvons-nous la capter et la distribuer à tout le monde ? »

Si un nouveau représentant commercial doit, par exemple, apprendre à rédiger une offre, il ou elle peut trouver en ligne un ou plusieurs modèles, ainsi que des simulations et autres conseils d’expert.

Ou prenez un logiciel, n’importe lequel, suggère la spécialiste. Certaines applications n’utilisent désormais qu’une partie de l’écran, l’autre partie étant réservée à l’assistance intégrée dans le programme. Plus besoin d’acheter un cours de formation séparée pour apprendre à se servir du logiciel.

Ce sont de bonnes nouvelles pour la future main d’œuvre nomade qui aura besoin d’accéder instantanément à des ressources, affirme Ruth Clark : les techniciens appelés sur un site pourront extraire de leur téléphone portable des guides de dépannage ; les commerciaux pourront télécharger des spécimens et à des simulations. « Tout cela va arriver automatiquement. Nous aurons de plus en plus accès à l’expertise. Il y aura moins d’occasions de formation ponctuelles et plus d’apprentissage intégré tout au long d’une carrière. »


Des formations à trois niveaux

Le SKF Distributor College propose plus d’une vingtaine de formations en ligne aux distributeurs agréés SKF. Ces cours leur permettent d’améliorer leurs connaissances sur les produits SKF et, ainsi, de mieux assister leurs clients dans leurs choix.

Madeleine Olausson de la communication-marketing de SKF précise que les cours en ligne sont un moyen de dispenser une formation cohérente et précise qui peut être mise à jour rapidement. Si les formations locales individuelles sont toujours courantes dans de nombreux pays, les sessions en ligne sur Internet ont connu une croissance rapide en 2006. À l’heure actuelle, celles-ci sont assurées dans dix langues, avec trois nouvelles langues en préparation. « Nous avons constaté que quand une personne suit un ou deux cours, elle revient en suivre d’autres. »

La majeure partie des cours actuels porte sur les caractéristiques et les applications des produits. De nouveaux cours sur le thème de l’industrie abordent en détail l’intégration des produits SKF dans des applications critiques. Le premier d’entre eux a pour sujet les agrégats et le ciment.

Le nouveau SKF Reliability Maintenance Institute (RMI) en ligne propose plusieurs cours de base pour les clients responsables de la gestion de l’outil de production, de la maintenance conditionnelle et de la maintenance mécanique. Les sessions, qui sont sanctionnés par des examens et des certificats de formation, complètent les cours pratiques dispensés par les spécialistes de la formation de SKF.

Lancé en 2006, le RMI en ligne est intégré au site SKF @ptitude Exchange (www.aptitudeexchange.com). « Je pense que les cours vont avoir du succès car les formateurs SKF l’utilisent pour compléter leurs méthodes habituelles. Ils vont aussi leur permettre de proposer des solutions de formation sur mesure pour répondre aux besoins spécifiques des clients, estime Mel Barratt, responsable du site Web @ptitude Exchange. Ils peuvent y avoir recours pour améliorer leur enseignement : ces cours peuvent être demandés préalablement à une formation dispensée en classe et ainsi libérer du temps pour en consacrer aux travaux pratiques. »

Les clients sont attirés par le concept du RMI en ligne. Le groupe Nestlé propose même ces cours via son propre intranet. « Nous voulons prendre plus d’initiatives en matière de stratégie de maintenance, explique Jan de Bruin des services d’ingénierie technique de Nestlé. Le RMI en ligne répond tout à fait à nos besoins pour rappeler les connaissances de base aux ingénieurs et techniciens de nos usines. 

– L’origine des défaillances de la plupart des équipements n’est pas due à l’âge mais plutôt à l’absence de bonnes pratiques en matière de fonctionnement et de maintenance. Il faut revenir à l’essentiel. Beaucoup de techniciens ne savent pas que de nombreuses défaillances dérivent d’un mauvais alignement, d’une mauvaise fixation, ou d’un nettoyage et d’une inspection aléatoires. »

Jan de Bruin apprécie le fait que l’institut soit administré par des ingénieurs ayant beaucoup d’expérience pratique. Il juge que l’heure est à ce genre de formation par Internet : « Les gens sont très indépendants aujourd’hui. Ils veulent apprendre, mais à leur propre rythme et au moment de leur choix. »

La formation interne en ligne de SKF comprend des cours de formation générale portant sur la sécurité informatique et le programme Six Sigma, ainsi que des modules permettant aux nouvelles recrues de s’informer rapidement sur les produits, la mission et la vision de SKF. Les collaborateurs, en particulier les commerciaux qui en tirent grand bénéfice, ont aussi accès au RMI en ligne et au SKF Distributor College.

SKF espère prochainement réunir toutes ses formations en un seul catalogue mondial à usage interne et externe. « Ensuite, nous ferons l’inventaire de tous nos cours pour éviter les chevauchements », indique Ann-Sofie Börjesson, responsable de la gestion des connaissances.