Un rayon de dynamisme
Deux cyclistes amateurs slovènes sont devenus entrepreneurs professionnels en inventant un moyeu de roue arrière de vélo unique en son genre.
Résumé
Ekstundo a été créée en décembre 2005 à Sežana, en Slovénie, par Boštjan Mahnič et Primož Gorjan, inventeurs de l’E-hub. C’est une entreprise privée mais elle reçoit des aides financières et logistiques d’une entreprise slovène, H.F. Metaltrade, et d’autres partenaires. L’E-hub est disponible en plusieurs modèles : six pour les vélos de route et trois pour les VTT. 2009 a été sa première année complète de production et de vente. Elle emploie huit collaborateurs à Sežana et 23 en tout.
(www.ekstundo.si, www.ehub.si.)
Deux cyclistes amateurs slovènes sont devenus entrepreneurs professionnels en inventant un moyeu de roue arrière de vélo unique en son genre.
Boštjan Mahnič et Primož Gorjan se sont rencontrés à Sežana, une petite ville slovène proche de Trieste, en Italie. Le premier avait étudié l’économie à l’université de Ljubljana et, comme son compère, avait suivi une filière technique au lycée. Leur passion commune pour le cyclisme les ayant rapprochés, ils se retrouvent à regarder ensemble une étape du Tour d’Italie à la télévision au printemps 2005. En voyant le peloton grimpant une côte à la peine, ils discutent du « point mort », l’instant de rupture qui intervient lorsque les manivelles sont verticales, quand une des jambes du cycliste a fini de pousser et que l’autre se prépare à le faire. Ce moment a toujours posé un problème dans ce sport, mais, à l’époque, personne n’avait encore réussi à proposer une solution convaincante. Si l’on arrive à éliminer ce point mort, se disent les deux hommes, on pourra améliorer considérablement les performances des coureurs.
Ils passent les trois années suivantes à chercher une solution commercialement viable. « Les huit premiers mois, on s’est concentré sur l’étude du mécanisme et sur le moyen de vaincre mécaniquement le point mort », se souvient Primož Gorjan. Leur invention repose sur l’insertion d’un système de suspension à l’intérieur du moyeu de roue arrière. Celui-ci sépare la rotation sur un axe de la partie centrale du moyeu, de celle d’une pièce externe reliée par les rayons à la jante. Ce montage donne au cycliste plus de puissance dans les moments forts du cycle de pédalage tandis qu’une partie de l’énergie est stockée dans le mécanisme à ressort du moyeu. Celle-ci est ensuite libérée pendant les moments faibles du cycle (les points morts), aidant le cycliste à les surmonter plus vite et en produisant moins d’efforts. Le ressort facilite également les transitions entre les deux moments, ce qui diminue les tensions s’exerçant sur les jambes.
Les deux hommes ont baptisé leur invention l’E-hub (E comme énergie, hub pour moyeu) et leur société, Ekstundo, qui signifie idée ou innovation. Boštjan Mahnič est le directeur général et Primož Gorjan, le directeur R&D. Le montage qu’ils ont fini par faire breveter est composé de 22 pièces en aluminium et en acier (quatre roulements SKF inclus), dont toutes sauf une sont fabriquées dans l’Union européenne.
Les inventeurs souhaitant que leur moyeu soit un produit haut de gamme, ils n’ont recherché que des composants de qualité supérieure, en particulier les quatre roulements équipant chaque moyeu. Primož Gorjan avait découvert les produits SKF dans ses emplois antérieurs : « Les roulements SKF ont été notre premier choix dès le départ car ils jouent un rôle primordial dans notre moyeu. Leurs performances doivent être excellentes. » Ceci a été confirmé par les essais qui ont montré que les roulements SKF duraient plus longtemps que ceux de la concurrence.
L’E-hub existe en six versions pour les vélos de route et en trois pour les VTT. « Après avoir fait des essais préliminaires avec 20 cyclistes, on s’est rendu compte qu’il nous fallait plusieurs modèles », précise Tomaz Abraht, directeur de la production chez Ekstundo. Le mécanisme à ressort doit être plus ou moins tendu selon le poids, la puissance et le niveau d’expérience du sportif. Les VTT exigent un mécanisme à ressort plus rigide de même qu’un moyeu qui tient compte de leurs freins à disque.
Fin 2005, l’E-hub avait reçu la médaille d’or de l’innovation aux salons professionnels de Nuremberg, en Allemagne, et de Celje, en Slovénie. Les entrepreneurs ont bénéficié de l’aide financière et logistique d’une entreprise slovène, H.F. Metaltrade, et de cinq partenaires. « On voulait commencer petit et s’agrandir, et non vendre l’activité à une grosse société », explique Boštjan Mahnič.
Entre mars 2006 et mai 2007, Ekstundo s’est attachée à tester et mesurer l’efficacité du moyeu en commandant des études indépendantes à des universités en Slovénie, en Italie et au Canada. Les résultats ont montré que l’E-hub renforçait de 7 à 10 % la puissance de pédalage, éliminait les points morts, soulageait les muscles et les genoux du cycliste et augmentait sa vitesse. Les bienfaits corollaires pour le sportif sont un rythme cardiaque moins soutenu, une hyperventilation réduite et moins d’acides lactiques dans le sang.
Le premier prototype était trop lourd pour les vélos de course. Les inventeurs ont donc réduit le poids à ce qu’il est aujourd’hui, soit 650 g. En janvier 2008, l’Union Cycliste Internationale (UCI) les a autorisés à vendre leur moyeu aux cyclistes professionnels. C’était une étape importante car il leur était impossible de faire des manœuvres d’approche sans cette approbation. « On avait commencé à commercialiser notre produit auprès des amateurs en attendant l’avis de l’UCI », fait remarquer Primož Gorjan. Le produit est breveté dans 146 pays.
Enfin, en mai 2008, l’entreprise a commencé à lancer le moyeu plus agressivement sur le marché. Une équipe qui en avait équipé ses vélos a remporté la Race Across America en juin 2008. L’année suivante, Ekstundo a formé et inscrit sa propre équipe E-hub et a terminé deuxième dans la catégorie Couple. Elle vend aujourd’hui ses produits en Slovénie, en Italie, au Canada, en Belgique, en Autriche, en Allemagne et en Espagne.
En décembre 2008, un magazine sportif slovène a publié un article consacré à la société illustré par une photo sur laquelle se bild uraient les roulements portant le logo SKF. SKF Slovénie l’a vue et a contacté la direction, ouvrant ainsi la voie à une coopération. Ekstundo teste actuellement une nouvelle génération de roulements SKF et les résultats sont, dit-on, excellents. Il est vraisemblable que les E-hubs finiront par être équipés de roulements hybrides SKF dont les billes en céramique sont plus légères et plus résistantes et génèrent moins de frottement. L’entreprise planche sur un palier de moyeu en composite formé de fibres de carbone pour réduire le poids de la version actuelle en aluminium.
Elle espère vendre 4 000 moyeux en 2009 et son objectif est d’équiper 25 % des 100 000 vélos professionnels vendus chaque année. Mais étant donné que l’E-hub est tout à fait adapté aux cyclistes amateurs, Boštjan Mahnič et Primož Gorjan tablent sur un autre chiffre : un milliard de vélos par an.
CYCLISME DE POINTE
Ekstundo a testé plusieurs types de roulements pour son moyeu novateur afin d’obtenir l’équilibre optimal entre faible frottement, grande rigidité, poids plume, longue durée de vie, etc.. En outre, l’ensemble du moyeu devait être étanche et facile à entretenir.
Le premier montage mis au point par Ekstundo faisait appel à des roulements à billes à contact oblique, mais la construction nécessaire pour intégrer ce type de roulements s’est révélée trop lourde. L’entreprise a donc opté pour des roulements rigides à billes. Plusieurs marques ont été testées, mais ce sont les roulements SKF qui se sont montrés les plus adaptés.
À l’heure actuelle, Ekstundo monte des roulements rigides à billes étanches et teste d’autres roulements de la gamme SKF :
• les roulements avec joints à faible
frottement ;
• les nouveaux roulements rigides à billes éco-énergétiques E2, dans lesquels le couple de frottement est réduit de 30 % au minimum par rapport aux roulements standard. Ce roulement a été conçu avant tout pour les moteurs électriques, mais Ekstundo les essaye étant donné qu’un moyeu de bicyclette requiert également un faible frottement ;
• les roulements hybrides avec billes en céramique en nitrure de silicium. Ils ont une vitesse admissible accrue et une durée de vie supérieure à celle des roulements à billes 100 % acier. La densité des billes en céramique ne représente que 40 % par rapport aux billes en acier ; elles sont plus légères et ont donc une inertie moindre. Cela signifie, par conséquent, une baisse des contraintes de la cage et une réduction du frottement en cas de vitesse élevée, une baisse de l’échauffement et une durée de service accrue de la graisse. En outre, elles réalisent de bonnes performances en cas de lubrification insuffisante.